Futur étudiant ? Lisez cette note
L’administration de Carrel nous a récemment demandé de laisser un avis sur notre expérience dans l’établissement. Certainement pour redorer son image, étant donné la quantité croissante d’avis critiques en ligne. Mais donner un avis, c’est aussi faire preuve d’honnêteté. Et c’est ce que je compte faire ici.
Je choisis de rester anonyme. D’abord parce que je tiens à protéger mon identité, mais aussi parce que certains faits que j’ai pu observer sont bien plus graves encore que ceux que je vais évoquer. J’ai pris la décision de ne pas en parler ici précisément pour éviter qu’on puisse me reconnaître. J’écris cet avis dans le seul but de prévenir ceux qui envisageraient sérieusement d’intégrer Carrel, et de leur donner un point de vue bien différent de l’image que l’école renvoie en vitrine.
Carrel n’est plus ce qu’il a été. Il reste aujourd’hui uniquement les vestiges d’une grande école. Le prestige d’antan ne tient plus qu’à des souvenirs ou à des réussites passées, qui ne correspondent plus du tout à ce qu’est devenu l’établissement.
L’enseignement est, dans l’ensemble, extrêmement pauvre. Les premières semaines m’ont donné l’impression qu’on allait vraiment apprendre, que les contenus allaient être intéressants et approfondis. Mais cette illusion a vite disparu. Très rapidement, les cours sont devenus creux, répétitifs, sans progression. Les apports théoriques sont minimes, la pédagogie inexistante. Parfois, nous passions trois heures et demie dans une salle sans rien faire. Certains dormaient, d’autres étaient sur leur ordinateur à faire complètement autre chose. Le formateur (ce ne sont pas des professeurs) n’intervenait quasiment pas ou faisait lui-même autre chose. J’ai même assisté à un cours où le formateur faisait une visio pour une autre école… tout en étant physiquement dans notre salle. C’est dire le niveau d’implication.
L’accompagnement à la recherche d’alternance est également très faible. Quelques offres nous sont envoyées, mais elles sont peu nombreuses, mal ciblées, et ne donnent pas envie. Il n’y a pas de vrais partenariats solides entre l’école et des entreprises. Contrairement à d’autres établissements, ici, vous êtes très seuls dans cette démarche.
Plus grave encore : la manière dont sont traités les élèves en difficulté. Dans ma classe, un élève avait clairement besoin d’un accompagnement renforcé. Au lieu de lui proposer un suivi personnalisé, on a tenté de le faire partir avant les examens. L’objectif était clair : éviter qu’il ne fasse baisser les statistiques de réussite. Carrel veut du 100 % de réussite au BTS, mais ne cherche pas à ce que tous les élèves réussissent. Ceux qui posent problème sont poussés vers la sortie.
Ce fonctionnement n’est pas isolé. Il reflète la politique globale de l’école : soigner les chiffres, l’image, les statistiques. Peu importe la qualité de la formation, tant que le pourcentage de réussite reste élevé.
Carrel s’appuie aussi beaucoup sur la communication. On voit régulièrement des élèves mis en avant, présentés comme des “ambassadeurs” de l’école. Ces étudiants, souvent brillants, sont largement publiés sur LinkedIn, montrés en exemple. Le message est : “Regardez ce qu’on forme ici”. Sauf que j’ai eu l’occasion d’échanger avec plusieurs d’entre eux. Ils sont très clairs : ils se sont construits seuls. L’école n’a presque rien apporté à leur parcours. Leur réussite est personnelle, parfois liée à leur alternance, mais en aucun cas à l’enseignement de Carrel. Pourtant, l’école tente de s’approprier leur réussite pour faire croire à une qualité de formation qui n’existe pas.
J’ai moi-même participé à un concours de négociation nationale dans lequel Carrel était représenté. Plusieurs de nos participants ont eu de très bons résultats. Et immédiatement, Carrel s’est félicité de nos performances, comme si elles étaient le résultat de leur encadrement. Là encore, c’est faux. Ce que nous avons appris, nous l’avons appris ailleurs.
Enfin, un point très révélateur du fonctionnement interne : l’administration n’aime pas la critique. L’an passé, un camarade a laissé un avis (plutôt modéré d’ailleurs), et il a rapidement été approché, de manière informelle, par un membre de l’équipe pédagogique. On lui a subtilement fait comprendre que son message n’était pas le bienvenu. On ne l’a pas convoqué, mais on a tout fait pour le dissuader de laisser cet avis visible. Cela en dit long sur la manière dont l’école gère le fond des problèmes : pas en les corrigeant, mais en tentant de faire taire ceux qui les dénoncent.
La preuve que beaucoup d’élèves sont déçus ? Le très faible nombre d’étudiants qui restent pour la licence proposée par Carrel après le BTS. Beaucoup cherchent à aller ailleurs. Moi-même, lors d’une réunion dans une autre école de commerce lyonnaise, j’ai croisé plusieurs anciens de Carrel qui m’ont dit être partis pour cette raison exacte : la pédagogie ne suit pas, et l’école ne tient pas ses promesses.
Certains formateurs étaient certes sympathiques humainement, et je ne le nie pas. Mais le problème n’est pas là. Il vient de l’absence d’outils, de contenus, de rigueur, de stratégie pédagogique. À Carrel, on ne nous a pas formés. On nous a juste surveillés pendant deux ans.
L’école nous avait également promis, lors de notre arrivée, un cadre de vie étudiant dynamique, avec un BDE actif, des animations, des événements pour créer une cohésion entre les promotions. Même si on est là avant tout pour travailler, ce genre d’éléments peut faire la différence dans l’équilibre d’une vie d’étudiant. Pourtant, en deux ans, il n’y a eu quasiment rien. À peine quelques animations isolées organisées par le lycée, une fois dans l’année. Le BDE, s’il existe, est totalement invisible. On a eu droit à une soirée dans l’année, et c’est tout. Là encore, ce qui avait été annoncé ne s’est jamais concrétisé.
Je ne me vanterai jamais d’avoir obtenu mon BTS grâce à Carrel. J’ai eu mon diplôme grâce à mon entreprise, à mes efforts, à mon entourage. Carrel n’a été qu’un lieu de passage. Un lieu où, malgré moi, je n’ai presque rien appris.
